Gif de Science #4 Micromoteur à propulsion

Comment neutraliser l’acidité du système gastrique efficacement et rapidement ? C’est une question qui se pose non seulement pour les personnes souffrant de remontées acides, mais également  les malades prenant des médicaments sensibles aux pH acides.

Ce qu’on voit ici, ce sont des microsphères polymères recouvertes de platine, ouvertes d’un côté, duquel s’échappe du magnésium. Ce magnésium réagit immédiatement avec l’eau acide de l’estomac, libérant du dihydrogène, qui sert de gaz de propulsion, et des ions HCO3⁻, qui neutralise l’acidité.

L’efficacité de ce système, testé sur modèles animaux, montre une neutralisation plus efficace et plus rapide que les médicaments existants actuellement.

Mou, F., Chen, C., Ma, H., Yin, Y., Wu, Q. and Guan, J. (2013), « Self-Propelled Micromotors Driven by the Magnesium–Water Reaction and Their Hemolytic Properties« . Angew. Chem. Int. Ed., 52: 7208–7212. doi:10.1002/anie.201300913

Gif de Science #3 Encapsulation

L’encapsulation de substances chimiques correspond à créer une paroi autour d’elles, afin de les véhiculer, les manipuler, tout en les protégeant de l’extérieur. On connaît bien ça, avec les gélules de médicaments, les lessives liquides dans de mini-sacs qui se dissolvent directement dans la machine, et avec les billes de jus de framboise pour décorer des assiettes en « cuisine moléculaire »…

Une nouvelle technique a été proposée dans le magazine Science, dont est tiré ce gif : un film polymère est présent en surface du liquide dans lequel tombe un goutte de la substance à encapsuler. L’impact permet de créer ces petits sacs, ultrafins, et très résistants.

Wrapping with a splash: High-speed encapsulation with ultrathin sheets Deepak Kumar et al. Science  16 Feb 2018 Vol. 359, Issue 6377, pp. 775-778

Gif de Science #2 Centipède géant contre souris

ATTENTION, CE GIF PEUT CHOQUER !

Voir des arthropodes attaquer des rongeurs, c’est toujours un moment… d’intense sensation. D’effroi même, en s’imaginant, solidarité mammalienne oblige, à la place de cette souris.

Ces centipèdes sont responsables de 11 % des admissions aux urgences à Hawaï, causant hypertension, attaques cardiaques, nécroses à l’endroit de la morsure, etc… Les chercheurs ont étudié son venin, en utilisant des souris (RIP les souris), et ont identifié dedans un peptide responsable de ses effets : il bloque certains canaux potassiques, agissant ainsi en perturbant le fonctionnement du système cardiovasculaire et respiratoire. L’avantage, c’est qu’ils ont également identifié un antidote, la régitabine, qui manquait à l’arsenal thérapeutique jusqu’à présent.

« Centipedes subdue giant prey by blocking KCNQ channels » Lei Luo et al. 

Gif de science… #1 Triops

Une petite série d’articles courts, qui viennent illustrer (à moins que ce ne soit le contraire !) une ou deux images animées GIF… ça vous dit ?

Il y a quelques semaines, on a acheté un kit pour élever des triops au petit dernier de la famille… Et contre toute attente, on en a eu un, qui aujourd’hui fait 3-4 cm de long…

L’internet mondial regorgeant d’infos sur les triops, il serait inutile de s’étendre dessus pendant longtemps. Présentés comme des « animaux préhistoriques », ces crustacés présents un peu partout sur Terre, avaient des ancêtres remarquablement proches morphologiquement il y a 200 millions d’années. Mais Wikipédia vous renseignera très efficacement !

Sur ce Gif, deux choses sont sympas à noter :

  • Le triops est sur le ventre, et on voit ainsi toutes ses pattes, qui en bougeant donnent un mouvement global ondulant lui permettant d’avancer, de fouiller dans le sable…
  • Le triops mue, et sa mue est encore accrochée à lui sur le gif : on la voit à gauche de l’image !

Ah, au fait, ces charmantes créatures se trouvent également à l’état sauvage en France, dans des mares temporaires, comme dans cette vidéo du Marais Poitevin !

 

[Science et Genre] #5 Contre les Papillomavirus : vacciner les hommes aussi !

En France, comme dans la plupart des pays occidentaux, sont disponibles depuis quelques années plusieurs vaccins contre les fameux HPV, ces maladies sexuellement transmissibles de la famille des papillomavirus, dont les lésions sur le col de l’utérus sont à l’origine de l’apparition de cancers. Ces vaccins protègent contre la plupart des papillomavirus cancérigènes, et leur profil bénéfice/risque est excellent. Restent quelques questions actuellement en suspens, comme la durée de la protection (pour l’instant, les études montrent une protection au moins valable pendant 10 ans), mais globalement, on estime qu’ils peuvent éviter 70 % des cancers du col de l’utérus (d’où l’intérêt de pratiquer des frottis cervicaux tout au long de sa vie pour se prémunir des 30 % restant !). Si ces virus sont également montrés du doigt pour d’autres cancers, (gorge, bouche, anus en particulier) ce sont bien les femmes les principales victimes, si bien que ces vaccins ne sont actuellement prescriptible que chez les jeunes femmes, et non les jeunes hommes en France (ils peuvent néanmoins être proposés aux hommes homosexuels de moins de 26 ans, ce qui pose évidemment des questions du « tri » à effectuer en fonction des orientations sexuelles… Hum…). C’était le cas également de la plupart des pays du monde jusqu’en 2013 : l’Australie, suivi par les USA, l’Autriche, la Suisse, l’Italie et le Canada, ont alors mis en place une recommandation vaccinale concernant les deux sexes. Compte tenu de la rareté des autres cancers que de celui du col de l’utérus, il s’agit très clairement pour ces pays de diminuer l’incidence de cette dernière pathologie, chez les femmes donc. Malgré la logique (les hommes pouvant être considérés comme les principaux « vecteurs » du papillomavirus, les vacciner permettrait, logiquement, de diminuer l’incidence de la maladie), l’efficacité de cette vaccination « tous genres confondus » est difficile à évaluer.

Couverture vaccinale et effet grégaire

En imaginant une très large couverture vaccinale (quasiment tout le monde vacciné, il est probable que la vaccination « tous genres confondus » soit réellement efficace :

Quasi tous les hommes sont vaccinés

Le principal vecteur est supprimé

Les femmes, même non vaccinées, sont protégées

Seulement, elle est loin d’être large. Au contraire, en France, elle est actuellement très faible : 17 % seulement des jeunes femmes en 2015 (source). En imaginant une couverture vaccinale masculine identique, il semble peu probable d’obtenir un quelconque effet, puisque le « principal vecteur » reste, à peu de chose près, conservé… Il est vrai qu’en Suède, avec 80 % des jeunes femmes vaccinées, le problème est différent. Il n’empêche : il est nécessaire de quantifier, en fonction de cette couverture, l’intérêt de la vaccination masculine.
Pour résumer : l’objectif recherché, c’est une augmentation générale de la protection, c’est-à-dire une diminution du nombre de personnes infectées, grâce à la vaccination. Et ce malgré l’absence d’une vaccination de TOUTES les jeunes femmes. On est ici dans la problématique d’une recherche d »immunité grégaire« , qui peut être résumée comme sur ce schéma :

Schéma du haut : épidémie sans vaccination
Schéma central : épidémie avec quelques vaccinations : effet grégaire faible : quasiment pas de protection de personnes non vaccinées.
Schéma du bas : large couverture vaccinale : la maladie ne se propage globalement plus, y compris chez les personnes non vaccinées.
Source : NIH (via wikipédia)

 

Même à couverture modérée : les hommes doivent aussi être vaccinés

Une vaste étude a été menée en Finlande AVANT la mise en place d’une quelconque recommandation vaccinale contre les HPV, pour déterminer l’intérêt d’une vaccination exclusivement féminine, ou tous genres confondus. Publiée en ligne en octobre 2017, dans l’International Journal Cancer, il fait clairement apparaître le bénéfice d’une vaccination tous genre confondu dans la protection des femmes contre les cancers du col de l’utérus.

Pour cela, l’équipe de chercheurs menée par Matti Lehtinen, de l’Institut Karolinska (Suède), ont comparé trois groupes de communautés en Finlande, représentant au total 80000 personnes :

  • Dans le Premier (Groupe A), pour chaque communauté, 50 % des jeunes filles ont été vaccinées, ainsi que 30 % des jeunes hommes
  • Dans le Second (Groupe B), seules 50 % des jeunes filles ont été vaccinées, pas les jeunes hommes
  • Dans le troisième (Groupe C), aucune personne n’a été vaccinée (situation aujourd’hui éthiquement impossible dans le contexte de recommandation du vaccin par les autorités médicales)

L’intérêt d’une telle étude réside dans le choix de l’évaluation de couvertures vaccinales relativement faibles, et reflètent davantage les situations réelles que si 90 % des personnes étaient vaccinées. À titre d’exemple, la couverture vaccinale aux USA est de 42 %, 87 % au Portugal, et la France très loin derrière…

Tiré d’une infographie du Centre National de Référence HPV et de l’INCa (pdf)

Pour être concis, l’étude montre une augmentation significative de l’efficacité globale du vaccin entre le groupe A (tous genre confondu) et le groupe B. L’efficacité globale, c’est ce qui correspond au pourcentage des sujets effectivement protégés par le vaccin dans la population, soit directement par le vaccin, soit par l’effet grégaire de la vaccination. Si on regarde les résultats pour l’ensemble des HPV oncogènes (y compris ceux non directement visés par le vaccin), on atteint 47,6 % de protection des femmes dans le groupe B, contre 53,3 % dans le groupe A. Compte tenu de la faible couverture vaccinale proposée dans cette publication, les 5,6 % d’écarts sont significatifs, et correspondent à un véritable bénéfice (Voir la partie : « pour aller plus loin… »).

On peut comprendre que les pouvoirs publics, en France, se focalise sur la vaccination des femmes, puisqu’elles sont les principales victimes des cancers liés aux HPV, compte tenu de la très grande faiblesse de la couverture vaccinale. Cependant, est-il pertinent de se priver de vacciner les principaux vecteurs de la maladie que sont les hommes ? Ces travaux semblent nous annoncer que non. Puisque la vaccination, pour nombre de maladies contagieuses, est un acte citoyen, de protection globale de la population – de soi, mais aussi de son entourage – les hommes doivent participer à cet effort.

 

Disclaimer : Je n’évoque pas ici la question du ratio coût / bénéfice de la vaccination, qui a été évalué dans plusieurs pays et qui semble être tout à fait positif, malgré la nécessité de poursuivre le dépistage par frottis. Chaque pays, chaque couverture vaccinale est différente, ce qui rend parfois difficile de transposer les résultats des études coût / bénéfice d’une région à une autre. Compte tenu des spécificités françaises (sécurité sociale, dépistage par frottis peu suivi, vaccination encore moins), je ne me permettrai pas d’en parler ici, n’étant ni épidémiologiste spécialiste en vaccination, ni économiste de la santé. 

 

Pour aller plus loin

La lecture de cet article a été un peu ardue, je l’avoue. Si je connais les outils statistiques de base, des notions autour de la vaccination m’ont manqué. Afin d’y voir plus clair, j’ai pu contacter deux des principaux auteurs de la publication (Matti Lehtinen et Vänskä Simopekka) qui m’ont permis de lever les incertitudes (Merci à eux). Voici quelques détails de la méthodologie employée. N’hésitez pas à me demander d’autres précisions en commentaires.

Vous l’aurez compris, l’enjeu de cette étude n’est pas d’établir l’efficacité du vaccin chez les vaccciné-es, mais surtout de mesurer l’effet grégaire de cette vaccination, c’est-à-dire d’évaluer la protection chez les personnes non vaccinées. Les défis que cela impose sont multiples :

  • il faut que les groupes (groupes A, groupe B, groupe témoin C) reste cohérents, qu’il n’y ait pas trop d’échanges avec d’autres groupes non concernés par l’étude. Les chercheurs ont donc travaillé avec des « communautés », et ont vérifié qu’elles restaient stables, ou du moins qu’elles évoluaient de façon similaire dans les trois groupes (11 communautés par groupes).
  • Lorsque l’étude a débuté, la proportion de personnes déjà vaccinées était totalement négligeable parmi les communautés des trois groupes (moins de 1 %). Les jeunes concernés par l’étude ont donc été en contact avec des personnes un peu plus âgées non vaccinés. Leurs éventuels partenaires sexuels n’était ainsi pas constitué de 50 % de femmes protégées (et 20 % d’hommes pour le groupe A), mais d’une proportion plus faible. Les chercheurs ont donc choisi de séparer les groupes A, B, C, en deux sous – groupes : les plus jeunes (nés en 1994-95) et les plus vieux (né en 1992-1993), ces derniers étant plus exposés à des relations sexuelles contaminantes que les autres.

Les résultats que j’ai exposé plus haut sont ceux obtenu pour les plus jeunes (nés en 94-95).

  • Pour ceux nés en 1992-1993, il n’y a pas de différence significative entre les groupes A, B. Il n’y a pas d’effet grégaire significatif, que ce soit dans le groupe A, comme dans le groupe B. Cela signifie que la couverture vaccinale, avec ou sans les 20 % d’hommes n’est pas suffisante pour permettre une apparition d’un effet grégaire, c’est-à-dire une protection pour les non vacciné-es. Cela peut paraître assez normal, puisqu’aucun de leurs partenaires sexuels plus âgés n’était protégé contre le HPV : la couverture vaccinale réelle des personnes pouvant contaminer ou pouvant être contaminées est bien inférieure aux 50 % de femmes (et 20 % d’hommes pour le groupe A)
  • Pour ceux nés en 1994-1995, l’effet grégaire est significatif, non seulement lorsqu’on compare les groupes A et B avec le groupe témoin C, mais également entre les groupes A et B, qui ne diffèrent que par les 20 % d’hommes vaccinés. Ceci s’explique aisément par la couverture vaccinale plus grande des partenaires sexuels de ces individus plus jeunes : ceux qui ont jusqu’à 2 ans de plus qu’eux sont également vaccinés.

Il est donc clair qu’un effet grégaire n’est pas à attendre lors des toutes premières années de vaccination, puisque les personnes non vaccinées ont encore, parmi leurs partenaires sexuels, potentiellement contaminants, de nombreux individus plus âgés, et non vaccinés. Dans ces travaux, on peut néanmoins voir que cet effet protecteur apparaît de façon significative dès que les individus d’un ou deux ans plus âgés, sont également vaccinés. Un rapide retour sur investissement !

Les auteurs de cette publication ont également étudié la protection du vaccin en fonction du génotype du papillomavirus. Les différences entre les HPV 16, 18, 31, 33, 45 sont importantes.

Il faut noter que le vaccin distribué dans cette étude a été réalisé uniquement pour la protection des génotypes HPV 16 et 18. Pourtant, il s’avère qu’il protège également contre les HPV 31, 33, 45, mais avec une efficacité très variable : d’environ 40 % pour les génotypes 31 et 33, et plus de 80 % pour le génotype 45. Les chiffres de protection globale donnés plus haut s’entendent pour l’ensemble de ces cinq génotypes. En analysant plus finement les résultats, les chercheurs ont ainsi pu mettre en avant que :

  • Il n’y avait pas de différence significative entre les groupes A et B pour les génotypes 16 et 45. En fait, pour ces deux HPV, aucun effet grégaire n’a pu être démontré. Pour le HPV 16, ces résultats confirment d’autres études : compte tenu de ses spécificités, seule une très grande couverture vaccinale permet réellement de faire émerger un effet grégaire. Le HPV 45, quant à lui, est trop rare dans les populations pour que son évolution aie pu être significative.
  • Pour les trois autres génotypes, l’effet grégaire est significatif pour les groupes A et B, et, dans les trois cas, supérieur pour le groupe où les hommes ont également été vaccinés.

Si cette étude montre que les hommes doivent également participer aux campagnes de vaccination contre les HPV, elle fait également état, par la variabilité des effets grégaires, et donc des efficacités globales du vaccin selon les génotypes des papillomavirus, de la nécessité d’étendre la couverture vaccinale contre ces maladies. Nous sommes bien ici dans un contexte de maladie contagieuse, aux conséquences pouvant être désastreuses. La vaccination, pour protéger les femmes principalement (mais également les hommes), semble être une solution particulièrement efficace, à l’unique condition qu’elle soit partagé par un bien plus grand nombre de personnes, femmes ET hommes.

Remarque : D’après l’échange avec les auteurs de l’étude, dans son contexte, en Finlande, avec cette couverture vaccinale, la vaccination des hommes, même à hauteur de 20 % seulement, a un rapport coût/bénéfice en faveur de la vaccination, à condition de considérer également les cancers masculins liés aux HPV. (Résultats non publiés)

Disclaimer 2 : Au cas où cela m’est demandé : oui, les auteurs ont déclaré avoir des liens (financements de l’étude, emploi) avec GSK, le fournisseur du vaccin.

Lehtinen, M. et al. (2017), « Impact of gender-neutral or girls-only vaccination against human papillomavirus—Results of a community-randomized clinical trial (I) » Int. J. Cancer. doi:10.1002/ijc.31119

[Flash Info Chimie] #55 Comment les plantes émettent leurs parfums

Ah ! Le doux parfums des champs de lavande, des mimosas, … des pétunias ! Ces parfums sont simplement liés à l’émission de composés organiques volatiles (COV) par ces plantes.

Les COV, on connaît souvent leur mauvais côté. Nocif, irritant, cancérigènes, ils sont omniprésents, simplement parce que les objets qui nous entourent, par exemple réalisés à l’aide de solvants divers encore souvent présents, relarguent, petit à petit ces composés (on pourra par exemple consulter cette page, de l’ADEME). Mais les COV, sont également issus de la nature, et les végétaux en émettent par exemple pour attirer ou repousser les insectes, qu’ils soient pollinisateurs ou nuisibles.

Les humains ont sélectionné au fil des siècles, les fleurs les plus parfumées… En augmentant ainsi les COV qu’elles émettent ! Par contre, le mécanisme d’émission, lui, reste très mal connu. Et -ouf- on en arrive au sujet de ce Flash… Une équipe internationale a établi les bases de ce mécanisme dans un article paru en juin dans la revue Science.

Petunia hybrida (photo : Anneli Salo)

L’idée préconçue autour de cette émission de COV résidait jusqu’alors en un transport passif de ces composés jusqu’à la surface des feuilles / pétales / etc… des plantes. De là, ils pouvaient s’évaporer jusqu’à nos fosses nasales. Les auteurs montrent dans cette étude que les COV dans la plante Petunia Hybrida ont besoin d’un transporteur trans-membranaire, nommé PhABCG1, pour circuler depuis les cellules jusqu’aux extrémités de la plante. Lorsque ce transporteur est absent, les COV s’accumulent à des niveaux toxiques dans la plante. Même si cette étude n’a été réalisée que sur un seul végétal, il est très probable que ce mécanisme soit très général.

« Emission of volatile organic compounds from petunia flowers is facilitated by an ABC transporter » Adebesin et al., Science 356, 1386–1388 (2017)

[Flash Info Chimie] #54 Aquaporines artificielles en nanotube de carbone

Parmi les transporteurs transmembranaires, ces protéines en forme de tunnel qui permettent à des espèces chimiques de traverser les membranes des cellules, les aquaporines, découvertes en 1992, ont pour rôle de faire circuler sélectivement l’eau, mais sans les ions qui sont dissout dedans. Grâce à une structure qui ressemble à un sablier, les molécules d’eau sont contraintes de circuler les unes à la suite des autres dans le transporteur. Peter Agre et Roderick MacKinnon ont reçu le prix Nobel de Chimie en 2003 pour leur découverte, et l’élucidation de leur structure.

Vidéo disponible en téléchargement ici sur le site officiel des Prix Nobel. Dans cette modélisation, suivez la molécule d’eau colorée en jaune circuler dans l’aquaporine.

Ce type de composé intéresse beaucoup les chimistes pour la fabrication de membranes sélectives, ne laissant passer qu’une sorte de composé, qu’un seul ion, qu’un seul solvant. Les applications sont nombreuses, tant de le domaine énergétique (les batteries haute performance nécessitent de telles membranes), que dans celui de la dépollution, de la dessalinisation de l’eau de mer, etc…

Bon, venons-en au point qui nous intéresse… Qu’est-ce qui est nanométrique, long, creux, et qui fait fantasmer les chimistes ? Les nanotubes de carbone, évidemment !

Jusqu’à présent, l’utilisation de nanotubes de carbone comme transporteurs transmembranaires sélectifs d’eau a été décevante, les ions circulants assez librement à travers. L’idée de l’équipe de scientifiques californiens, menés par Ramya H. Tunuguntla, a été de réduire le diamètre intérieur de nanotubes, en passant de 1,5 nm de diamètre pour les études précédentes à 0,8 nm.
Avec une telle finesse les molécules d’eau sont contraintes, comme pour les aquaporines naturelles, de se mettre en file indienne, plutôt qu’avancer en groupe plus large. Mais grâce aux propriétés hydrophobiques des nanotubes, il existe très peu d’interaction entre les murs du tube, et les molécules d’eau.

à gauche : dans un nanotube large (~ 1,5 nm de diamètre intérieur) les molécules d’eau circulent, reliées entre elles par des liaisons intermoléculaires, en groupe qui occupe tout l’espace. à droite, dans les nanotubes plus fins (~ 0,8 nm) les molécules sont en file indienne, également liées par des interaction intermoléculaires (tiré de l’article de Tunuguntla et al.)

Contrairement à ce qu’on aurait pu imaginer initialement, l’eau circule dix plus vite dans ces nanotubes plus fins que dans ceux plus larges, en raison de cette disposition en file indienne. La vitesse (de 10¹⁰ à 10¹¹ molécules par seconde selon le pH) est également plus grande que dans les aquaporines naturelles, dont les parois internes forment ponctuellement des liaisons intermoléculaires avec les molécules d’eau, ralentissant ainsi leur progression.

La sélectivité ionique est également grandement augmentée : globalement, les anions (ions chargés négativement) ne passent pas, au contraire des cations (chargés positivement), jusqu’à des concentrations plus élevées que celle de l’eau de mer. Pour la désalinisation, cela pourrait éventuellement suffire : les anions et cations se baladant toujours ensemble (or exception causée par exemple par une tension électrique), si l’un des deux ne peut passer, l’autre ne passera pas non plus.

Reste encore beaucoup de travaux avant d’utiliser ces dispositifs pour du véritable dessalement ou de la purification d’eau ou d’ions à grande échelle… Il est cependant tout à fait intéressant de voir que des nanotechnologies pourraient dans le futur faire partie de solutions de dépollution / dessalement dans des installations de taille industrielles.

« Enhanced water permeability and tunable ion selectivity in subnanometer carbon nanotube porins » Tunuguntla et al., Science 357, 792–796 (2017)

A signaler, sur l’intérêt des nanotubes de carbone : nanogénérateurs hydroélectriques sur Pour La Science

[Flash Info Chimie] #53 Un vieux médicament contre l’asthme, prometteur contre la maladie de Parkinson

La maladie de Parkinson, comme d’autres maladies neurodégénératives, se manifeste par la formation d’agrégats anormaux de protéines dans les cellules du système nerveux, appelés dans ce cas « Corps de Lowy« .

Allure caractéristique d’une personne atteinte de la maladie de Parkinson (Sir William Richard Gowers, 1886)

Les axes actuels de développement de traitements consistent en l’élimination de α-synucléine, la protéine qui constitue majoritairement ces corps de Lowy, ou en le blocage de sa transformation en composés neuro-toxique.

Dans une publication dans la revue Science, Shuchi Mittal et ses collègues proposent une démarche différente pour l’identification de substances actives contre ces corps de Lowy, et donc, contre la maladie de Parkinson : ils ont cherché à identifier, parmi plus de mille composés déjà connus, ceux qui inhibent l’expression du gène codant pour l’α-synucléine (appelé SNCA).

Leurs résultats a été surprenant : les meilleurs inhibiteurs de l’expression du gène SNCA font partie de la classe bien connue des agonistes de β2-adrenorecepteur (β2-AR). Non seulement ils ont identifié clairement un nouveau rôle des β2-AR, (qui régulent donc l’expression du SNCA)  mais ils ouvrent également la voie à un traitement médicamenteux.

Bon, la « classe bien connue des agonistes de β2-AR », c’est un peu abusif de ma part. Je ne la connaissais pas, cette classe, pas plus que je ne connaissais ces β2-AR… Pourtant, des composés classiques en font partie, dont le salbutamol  (Vous savez, la fameuse « Ventoline® ») ou le clenbuterol, ce stéroïde anabolisant tant utilisé en dopage sportif ! On connaît également des antagonistes de β2-AR, comme le propanolol le premier bêta-bloquant découvert.

Les scientifiques ont donc vérifié, avec succès, sur modèle cellulaire (sur des lignées cellulaires humaines parkinsonienne) puis sur modèle animal (chez des lignées de souris parkinsonienne) que les deux agonistes de β2-AR diminuaient les quantités d’α-synucléine, dans les cellules, mais aussi prolongeaient leur durée de vie.

Et chez l’humain alors ?

S’il est, d’habitude, délicat de mesurer l’effet d’une substance chez l’humain, sans passer par la case « essai clinique », les chercheurs ont pu se baser dans cette étude sur des données de la « Norwegian Prescription Database », qui met à la disposition des scientifiques les données sur les prescriptions médicales de tous les norvégiens depuis 2004. Grâce à cet énorme corpus, ils ont pu comparer la survenue de la maladie de Parkinson chez les patients prenant régulièrement du salbutamol, du propanolol, ou ni l’un ni l’autre.

Les résultats sont parlants: le salbutamol a bel et bien un effet protecteur vis-à-vis de la survenue de la maladie de Parkinson, et le propanolol favorise l’apparition de la maladie.
Le groupe, qui a pris au moins une fois du propanolol a environ deux fois plus de cas de maladie de Parkinson qu’attendu.
Celui qui a pris au moins une fois du salbutamol a 40 % de cas en moins qu’attendu. Dans ce cas, les chercheurs ont séparé ce groupe en trois, en fonction de la quantité prescrite : Pour les plus gros utilisateurs (plus de 180 doses journalières prescrites en 4 ans), la survenue de la maladie de Parkinson a été divisée par deux. Pour les utilisateurs les plus occasionnels (moins de 60 doses en 4 ans), la diminution est anecdotique.

Compte tenu des effets secondaires du salbutamol, ou encore du clenbuterol, leur avantage thérapeutique en action préventive n’est clairement pas démontré. Néanmoins, les premiers essais in vitro indiquent qu’ils pourraient ouvrir la voie vers la mise au point de traitements curatifs chez des patients ayant déjà développé la maladie.