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[Science et Genre] #5 Contre les Papillomavirus : vacciner les hommes aussi !

En France, comme dans la plupart des pays occidentaux, sont disponibles depuis quelques années plusieurs vaccins contre les fameux HPV, ces maladies sexuellement transmissibles de la famille des papillomavirus, dont les lésions sur le col de l’utérus sont à l’origine de l’apparition de cancers. Ces vaccins protègent contre la plupart des papillomavirus cancérigènes, et leur profil bénéfice/risque est excellent. Restent quelques questions actuellement en suspens, comme la durée de la protection (pour l’instant, les études montrent une protection au moins valable pendant 10 ans), mais globalement, on estime qu’ils peuvent éviter 70 % des cancers du col de l’utérus (d’où l’intérêt de pratiquer des frottis cervicaux tout au long de sa vie pour se prémunir des 30 % restant !). Si ces virus sont également montrés du doigt pour d’autres cancers, (gorge, bouche, anus en particulier) ce sont bien les femmes les principales victimes, si bien que ces vaccins ne sont actuellement prescriptible que chez les jeunes femmes, et non les jeunes hommes en France (ils peuvent néanmoins être proposés aux hommes homosexuels de moins de 26 ans, ce qui pose évidemment des questions du « tri » à effectuer en fonction des orientations sexuelles… Hum…). C’était le cas également de la plupart des pays du monde jusqu’en 2013 : l’Australie, suivi par les USA, l’Autriche, la Suisse, l’Italie et le Canada, ont alors mis en place une recommandation vaccinale concernant les deux sexes. Compte tenu de la rareté des autres cancers que de celui du col de l’utérus, il s’agit très clairement pour ces pays de diminuer l’incidence de cette dernière pathologie, chez les femmes donc. Malgré la logique (les hommes pouvant être considérés comme les principaux « vecteurs » du papillomavirus, les vacciner permettrait, logiquement, de diminuer l’incidence de la maladie), l’efficacité de cette vaccination « tous genres confondus » est difficile à évaluer.

Couverture vaccinale et effet grégaire

En imaginant une très large couverture vaccinale (quasiment tout le monde vacciné, il est probable que la vaccination « tous genres confondus » soit réellement efficace :

Quasi tous les hommes sont vaccinés

Le principal vecteur est supprimé

Les femmes, même non vaccinées, sont protégées

Seulement, elle est loin d’être large. Au contraire, en France, elle est actuellement très faible : 17 % seulement des jeunes femmes en 2015 (source). En imaginant une couverture vaccinale masculine identique, il semble peu probable d’obtenir un quelconque effet, puisque le « principal vecteur » reste, à peu de chose près, conservé… Il est vrai qu’en Suède, avec 80 % des jeunes femmes vaccinées, le problème est différent. Il n’empêche : il est nécessaire de quantifier, en fonction de cette couverture, l’intérêt de la vaccination masculine.
Pour résumer : l’objectif recherché, c’est une augmentation générale de la protection, c’est-à-dire une diminution du nombre de personnes infectées, grâce à la vaccination. Et ce malgré l’absence d’une vaccination de TOUTES les jeunes femmes. On est ici dans la problématique d’une recherche d »immunité grégaire« , qui peut être résumée comme sur ce schéma :

Schéma du haut : épidémie sans vaccination
Schéma central : épidémie avec quelques vaccinations : effet grégaire faible : quasiment pas de protection de personnes non vaccinées.
Schéma du bas : large couverture vaccinale : la maladie ne se propage globalement plus, y compris chez les personnes non vaccinées.
Source : NIH (via wikipédia)

 

Même à couverture modérée : les hommes doivent aussi être vaccinés

Une vaste étude a été menée en Finlande AVANT la mise en place d’une quelconque recommandation vaccinale contre les HPV, pour déterminer l’intérêt d’une vaccination exclusivement féminine, ou tous genres confondus. Publiée en ligne en octobre 2017, dans l’International Journal Cancer, il fait clairement apparaître le bénéfice d’une vaccination tous genre confondu dans la protection des femmes contre les cancers du col de l’utérus.

Pour cela, l’équipe de chercheurs menée par Matti Lehtinen, de l’Institut Karolinska (Suède), ont comparé trois groupes de communautés en Finlande, représentant au total 80000 personnes :

  • Dans le Premier (Groupe A), pour chaque communauté, 50 % des jeunes filles ont été vaccinées, ainsi que 30 % des jeunes hommes
  • Dans le Second (Groupe B), seules 50 % des jeunes filles ont été vaccinées, pas les jeunes hommes
  • Dans le troisième (Groupe C), aucune personne n’a été vaccinée (situation aujourd’hui éthiquement impossible dans le contexte de recommandation du vaccin par les autorités médicales)

L’intérêt d’une telle étude réside dans le choix de l’évaluation de couvertures vaccinales relativement faibles, et reflètent davantage les situations réelles que si 90 % des personnes étaient vaccinées. À titre d’exemple, la couverture vaccinale aux USA est de 42 %, 87 % au Portugal, et la France très loin derrière…

Tiré d’une infographie du Centre National de Référence HPV et de l’INCa (pdf)

Pour être concis, l’étude montre une augmentation significative de l’efficacité globale du vaccin entre le groupe A (tous genre confondu) et le groupe B. L’efficacité globale, c’est ce qui correspond au pourcentage des sujets effectivement protégés par le vaccin dans la population, soit directement par le vaccin, soit par l’effet grégaire de la vaccination. Si on regarde les résultats pour l’ensemble des HPV oncogènes (y compris ceux non directement visés par le vaccin), on atteint 47,6 % de protection des femmes dans le groupe B, contre 53,3 % dans le groupe A. Compte tenu de la faible couverture vaccinale proposée dans cette publication, les 5,6 % d’écarts sont significatifs, et correspondent à un véritable bénéfice (Voir la partie : « pour aller plus loin… »).

On peut comprendre que les pouvoirs publics, en France, se focalise sur la vaccination des femmes, puisqu’elles sont les principales victimes des cancers liés aux HPV, compte tenu de la très grande faiblesse de la couverture vaccinale. Cependant, est-il pertinent de se priver de vacciner les principaux vecteurs de la maladie que sont les hommes ? Ces travaux semblent nous annoncer que non. Puisque la vaccination, pour nombre de maladies contagieuses, est un acte citoyen, de protection globale de la population – de soi, mais aussi de son entourage – les hommes doivent participer à cet effort.

 

Disclaimer : Je n’évoque pas ici la question du ratio coût / bénéfice de la vaccination, qui a été évalué dans plusieurs pays et qui semble être tout à fait positif, malgré la nécessité de poursuivre le dépistage par frottis. Chaque pays, chaque couverture vaccinale est différente, ce qui rend parfois difficile de transposer les résultats des études coût / bénéfice d’une région à une autre. Compte tenu des spécificités françaises (sécurité sociale, dépistage par frottis peu suivi, vaccination encore moins), je ne me permettrai pas d’en parler ici, n’étant ni épidémiologiste spécialiste en vaccination, ni économiste de la santé. 

 

Pour aller plus loin

La lecture de cet article a été un peu ardue, je l’avoue. Si je connais les outils statistiques de base, des notions autour de la vaccination m’ont manqué. Afin d’y voir plus clair, j’ai pu contacter deux des principaux auteurs de la publication (Matti Lehtinen et Vänskä Simopekka) qui m’ont permis de lever les incertitudes (Merci à eux). Voici quelques détails de la méthodologie employée. N’hésitez pas à me demander d’autres précisions en commentaires.

Vous l’aurez compris, l’enjeu de cette étude n’est pas d’établir l’efficacité du vaccin chez les vaccciné-es, mais surtout de mesurer l’effet grégaire de cette vaccination, c’est-à-dire d’évaluer la protection chez les personnes non vaccinées. Les défis que cela impose sont multiples :

  • il faut que les groupes (groupes A, groupe B, groupe témoin C) reste cohérents, qu’il n’y ait pas trop d’échanges avec d’autres groupes non concernés par l’étude. Les chercheurs ont donc travaillé avec des « communautés », et ont vérifié qu’elles restaient stables, ou du moins qu’elles évoluaient de façon similaire dans les trois groupes (11 communautés par groupes).
  • Lorsque l’étude a débuté, la proportion de personnes déjà vaccinées était totalement négligeable parmi les communautés des trois groupes (moins de 1 %). Les jeunes concernés par l’étude ont donc été en contact avec des personnes un peu plus âgées non vaccinés. Leurs éventuels partenaires sexuels n’était ainsi pas constitué de 50 % de femmes protégées (et 20 % d’hommes pour le groupe A), mais d’une proportion plus faible. Les chercheurs ont donc choisi de séparer les groupes A, B, C, en deux sous – groupes : les plus jeunes (nés en 1994-95) et les plus vieux (né en 1992-1993), ces derniers étant plus exposés à des relations sexuelles contaminantes que les autres.

Les résultats que j’ai exposé plus haut sont ceux obtenu pour les plus jeunes (nés en 94-95).

  • Pour ceux nés en 1992-1993, il n’y a pas de différence significative entre les groupes A, B. Il n’y a pas d’effet grégaire significatif, que ce soit dans le groupe A, comme dans le groupe B. Cela signifie que la couverture vaccinale, avec ou sans les 20 % d’hommes n’est pas suffisante pour permettre une apparition d’un effet grégaire, c’est-à-dire une protection pour les non vacciné-es. Cela peut paraître assez normal, puisqu’aucun de leurs partenaires sexuels plus âgés n’était protégé contre le HPV : la couverture vaccinale réelle des personnes pouvant contaminer ou pouvant être contaminées est bien inférieure aux 50 % de femmes (et 20 % d’hommes pour le groupe A)
  • Pour ceux nés en 1994-1995, l’effet grégaire est significatif, non seulement lorsqu’on compare les groupes A et B avec le groupe témoin C, mais également entre les groupes A et B, qui ne diffèrent que par les 20 % d’hommes vaccinés. Ceci s’explique aisément par la couverture vaccinale plus grande des partenaires sexuels de ces individus plus jeunes : ceux qui ont jusqu’à 2 ans de plus qu’eux sont également vaccinés.

Il est donc clair qu’un effet grégaire n’est pas à attendre lors des toutes premières années de vaccination, puisque les personnes non vaccinées ont encore, parmi leurs partenaires sexuels, potentiellement contaminants, de nombreux individus plus âgés, et non vaccinés. Dans ces travaux, on peut néanmoins voir que cet effet protecteur apparaît de façon significative dès que les individus d’un ou deux ans plus âgés, sont également vaccinés. Un rapide retour sur investissement !

Les auteurs de cette publication ont également étudié la protection du vaccin en fonction du génotype du papillomavirus. Les différences entre les HPV 16, 18, 31, 33, 45 sont importantes.

Il faut noter que le vaccin distribué dans cette étude a été réalisé uniquement pour la protection des génotypes HPV 16 et 18. Pourtant, il s’avère qu’il protège également contre les HPV 31, 33, 45, mais avec une efficacité très variable : d’environ 40 % pour les génotypes 31 et 33, et plus de 80 % pour le génotype 45. Les chiffres de protection globale donnés plus haut s’entendent pour l’ensemble de ces cinq génotypes. En analysant plus finement les résultats, les chercheurs ont ainsi pu mettre en avant que :

  • Il n’y avait pas de différence significative entre les groupes A et B pour les génotypes 16 et 45. En fait, pour ces deux HPV, aucun effet grégaire n’a pu être démontré. Pour le HPV 16, ces résultats confirment d’autres études : compte tenu de ses spécificités, seule une très grande couverture vaccinale permet réellement de faire émerger un effet grégaire. Le HPV 45, quant à lui, est trop rare dans les populations pour que son évolution aie pu être significative.
  • Pour les trois autres génotypes, l’effet grégaire est significatif pour les groupes A et B, et, dans les trois cas, supérieur pour le groupe où les hommes ont également été vaccinés.

Si cette étude montre que les hommes doivent également participer aux campagnes de vaccination contre les HPV, elle fait également état, par la variabilité des effets grégaires, et donc des efficacités globales du vaccin selon les génotypes des papillomavirus, de la nécessité d’étendre la couverture vaccinale contre ces maladies. Nous sommes bien ici dans un contexte de maladie contagieuse, aux conséquences pouvant être désastreuses. La vaccination, pour protéger les femmes principalement (mais également les hommes), semble être une solution particulièrement efficace, à l’unique condition qu’elle soit partagé par un bien plus grand nombre de personnes, femmes ET hommes.

Remarque : D’après l’échange avec les auteurs de l’étude, dans son contexte, en Finlande, avec cette couverture vaccinale, la vaccination des hommes, même à hauteur de 20 % seulement, a un rapport coût/bénéfice en faveur de la vaccination, à condition de considérer également les cancers masculins liés aux HPV. (Résultats non publiés)

Disclaimer 2 : Au cas où cela m’est demandé : oui, les auteurs ont déclaré avoir des liens (financements de l’étude, emploi) avec GSK, le fournisseur du vaccin.

Lehtinen, M. et al. (2017), « Impact of gender-neutral or girls-only vaccination against human papillomavirus—Results of a community-randomized clinical trial (I) » Int. J. Cancer. doi:10.1002/ijc.31119

Vaccins : marche-t-on sur la tête ?

Aujourd’hui, j’ai eu envie de faire exploser les stats de mon blog, alors, plutot que de parler de chimie, ou d’inégalité de genre dans l’enseignement supérieur et la recherche, j’ai choisi LA VACCINATION comme sujet. Vous allez voir, ça marche à tout les coups !

Quand on parle vaccination, on a immédiatement deux clans, anti, et pro qui montrent les armes, et qui s’en servent ! Résolument pro-vaccination, je suis cependant gêné par certains arguments de mon propre « clan ». J’y reviendrais peut-être…

Et au-delà des arguments, cet affrontement se traduit par des prises de décision sur la politique vaccinale en France : toute suppression de recommandation de vaccin est pris comme une victoire des « antis », et tout nouveau vaccin est un succès des « pros » ! Le résultat : les vaccins obligatoires n’ont pas été revus depuis 1964. Par ailleurs, il peut paraître paradoxal de constater que si la France est un des derniers pays européens à conserver des vaccins obligatoires, la couverture vaccinale n’est pas meilleure qu’ailleurs.

En septembre 2014, un rapport du Haut Conseil de la santé publique (HCSP) a préconisé une remise à plat de la politique vaccinale, de statuer sur le caractère obligatoire de certains vaccins, et de rendre plus lisible les recommandations, et plus accessible et plus égalitaire la vaccination. Certains y ont vu un premier pas vers la suppression de l’obligation, d’autres, au contraire, imaginent une généralisation de l’obligation à tous les vaccins recommandés.

J’ai eu envie de donner mon point de vue : pour moi, il y a deux types de maladies contre lesquelles on peut/il faut vacciner. Celles qui concernent un risque collectif, et celles qui concernent un risque individuel uniquement. On ne peut pas gérer de la meme façon l’obligation ou les recommandations vaccinales s’il s’agit de prévenir l’apparition d’une maladie, meme grave, chez le seul vacciné, ou s’il s’agit de protéger à titre collectif l’ensemble des membres d’une société, voire de viser l’éradication d’une maladie.

Pour illustrer ces deux éléments, j’ai choisi deux exemples emblématiques, deux maladies gravissimes, pour lesquelles la vaccination est obligatoire : la poliomyélite et le tétanos.

La poliomyélite est une maladie qui provoque, entre un cas sur 200 et un cas sur 1000, une faiblesse musculaire qui évolue vers une paralysie complète. Dans les autres cas, elle peut passer inaperçue, ou provoquer des paralysies partielles, et/ou passagères. On associe souvent cette maladie à des eaux croupissantes dans lesquelles elle se développerait, mais c’est une erreur : c’est bien une maladie qui ne se transmet que d’humains à humains. Elle peut survivre quelques semaines /mois dans les milieux humides, mais sans se multiplier. Il n’y a pas, donc, d’autres réservoirs que l’espèce humaine. Pour cette raison, elle peut être éradiquée : si tous les humains sont immunisés, elle disparaîtra, comme a déjà disparu la variole. Pour cela, le vaccin est une arme idéale. Son efficacité est de 85 %. En France, le dernier cas remonte à 1995 (cas importé). La maladie est totalement éradiqué en Amérique. Par contre, elle fait des ravages en Afrique sub-saharienne. Pour moi, la vaccination obligatoire est justifiée : il s’agit ici d’une mesure de santé publique, visant l’éradication totale d’une maladie. Se vacciner, c’est se protéger, protéger aussi ceux qui ne peuvent pas l’être (pour des raisons diverses comme des immunodépressions, des allergies…), et participer à un programme mondial d’élimination de la polio.

Le tétanos est une maladie terrible lorsqu’on l’attrape sans être vacciné. Le taux de létalité est d’environ 30 % (bien qu’il soit beaucoup plus faible dans les pays industrialisés que dans les pays en voie de développement). La maladie provoque des spasmes musculaires très douloureux, qui se finissent par le décès liés aux dysfonctionnements des muscles respiratoires, ou, un peu plus tard par le dysfonctionnement du muscle cardiaque. Mais cette maladie ne peut pas être éradiquée : le sol est le réservoir naturel du bacille responsable. Se faire vacciner ne protège ni son entourage, ni personne d’autre, ni ne permettra d’éradiquer la maladie. Je ne vois pas pourquoi cette vaccination est obligatoire. Ceci dit, je ne dormirais vraiment pas sur mes deux oreilles si moi-même, mes enfants et mes proches n’étions pas vaccinés. D’autre part, l’obligation vaccinale concerne les enfants. Et la société s’accorde un droit de regard sur la façon dont ils sont traités. Il est prévu dans des cas extrêmes de maltraitance, que la justice décide à la place des parents de ce qui est bon pour les enfants. Pour ma part, et cela ne reflète que mon avis propre, il ne me semble pas que le refus de la vaccination anti-tétanos soit un acte de maltraitance.

Ces deux exemples montrent que la question de la vaccination, de sa recommandation et de son obligation doit dépendre de son rôle, individuel et/ou sociétal. Il me parait évident qu’en France, et d’un point de vue individuel, la vaccination contre le tétanos est aussi, voire plus nécessaire que la vaccination contre la polio. Mais puisque d’un point de vue protection collective elle n’a pas d’intéret, le caractère obligatoire n’est pas justifié.

Mais la distinction protection individuelle/collective ne suffit pas à faire une politique d’obligation et de recommandation. D’autres paramètres, difficiles à appréhender, doivent entrer en compte :

  • Le rapport bénéfice/risque : comme tout produit biologiquement actif, les vaccins peuvent engendrer des produits secondaires, qui sont évalués lors des demandes de mises sur le marché. On peut très bien décider, en fonction des maladies concernés, d’accepter ou non les effets secondaires, et donc de se vacciner ou pas.
  • L’efficacité des vaccins n’est jamais totale. Pour les questions de protection individuelle, on est en droit de prendre en compte ce paramètre. Pourquoi se protéger d’une maladie qu’on a peu de risque d’attraper, avec un vaccin qui protège que dans 60 % des cas ? Ceci dit, dans le cas d’une vaccination qui permet une protection collective (comme pour la polio), même si le vaccin est peu efficace, cela peut suffire pour diminuer considérablement le risque de contamination. Prenons comme exemple la fièvre Ebola : il est admis qu’en période épidémique, chaque personne en contamine, en moyenne, deux autres. Si on trouvait un vaccin efficace dans 50 % des cas, le risque d’être malade dans les zones touchées reste très important. Mais la maladie cesse de s’étendre, puisque chaque malade ne peut en contaminer plus qu’un seul ! (Ce raisonnement est évidemment simpliste, mais il montre qu’une protection individuelle partielle peut permettre une protection globale efficace)
  • Certaines maladies se soignent bien mieux aujourd’hui qu’hier, la vaccination peut cesser de devenir indispensable pour elle.
  • Qui dit obligation et recommandation, dit (en France du moins) remboursement du vaccin, ce qui implique un coût pour la société. Certaines méthodes de prévention des maladies peuvent être aussi efficaces, ou plus efficaces que la vaccination. On est en droit de se poser la question de l’intérêt de la promotion (et de son remboursement) des vaccins dans ce cadre.

Afin d’illustrer un peu plus mes propos, je voudrais prendre deux exemples supplémentaires (oui, je sais, ça fait long…)

La tuberculose est une maladie qui fait 1,5 millions de mort par an dans le monde. Il existe un vaccin, le BCG, administré chez 100 millions de personnes par an dans le monde, dont l’efficacité fait débat.

Avant d’aller plus loin, il faut savoir que la tuberculose se traite par antibiotique, mais qu’il existe des formes de plus en plus résistantes, contre lesquelles nous sommes démunis. L’utilisation massive d’un vaccin est un enjeu majeur de la santé mondiale.

L’efficacité du BCG fait débat : il protège efficacement les enfants contre certaines formes de la tuberculose, en particulier les terribles méningites tuberculeuses. Mais la protection contre les formes pulmonaires, les plus courantes, est faible, voire inexistante. Il s’agit donc d’un vaccin intéressant à titre individuel, mais, hélas, non à titre collectif. La vaccination par le BCG, même massive, n’a pas d’impact sur la propagation de la maladie… Pire, même, il peut s’avérer néfaste pour la détection de la tuberculose, puisqu’il influence les résultats des tests tuberculiniques…

En 2010, l’obligation vaccinale a été levée en France, même si le vaccin reste fortement recommandé pour les personnes à risques. Il reste donc urgent de trouver un vaccin efficace qui pourrait permettre d’éradiquer la maladie

Le Gardasil est un vaccin contre certains HPV (papillomavirus humain), responsables des cancers du col de l’utérus. Ce vaccin doit être administré avant tout contact avec le HPV, puisqu’il pourrait favoriser l’apparition de lésions cancéreuses si la personne est déjà porteuse de ce type de virus… D’où une vaccination précoce, avant l’âge des premiers rapports sexuels. Ce vaccin a été très critiqué, attaqué suite à des mises en cause dans la survenue de maladies auto-immunes en particulier. Je n’irais pas dans ce sens là : d’un point de vue épidémiologique, il n’y a pas de lien entre ce vaccin et un risque particulier de développer ces maladies. Pourtant, des scientifiques sérieux continuent à critiquer ce vaccin aujourd’hui recommandé… Et pour des bonnes raisons.

  • L’efficacité du vaccin reste encore à démontrer. Il est encore trop tôt pour savoir s’il permet réellement de protéger contre les cancers du col de l’utérus. S’il démontre son efficacité, la donne sera différente !
  • Il existe un moyen de surveillance dont l’efficacité a fait ses preuves de la survenue de ces cancers : les frottis. C’est actuellement la seule arme éprouvée contre les cancers du col de l’utérus.
  • Le vaccin est cher (400 € par personne). D’après D. Dupagne, « une dépense de 400€ pour 400 000 jeunes filles tous les ans (160 millions d’euros). Une telle somme aurait peut-être été mieux utilisée en organisant au niveau national le dépistage par frottis, qui a fait ses preuves. »
  • Ce vaccin protège (s’il protège) individuellement. Il reste à démontrer qu’il peut diminuer l’incidence des HPV impliqués dans la survenue de cancers… Peut-etre faudrait-il aussi imaginer vacciner les hommes !

Tout cela ne montre pas que le Gardasil est à jeter à la poubelle, mais sans doute faut-il être un peu plus vigilant pour sa recommandation…

Bon, après tant d’exemples, je vous laisse reposer un peu. Tout cela m’amène à vous inviter à toujours étudier avec raison, et non passion, ces questions de vaccination. On peut être, et c’est mon cas, pro-vaccination, sans pour autant se faire vacciner contre tout et n’importe quoi, et souhaiter imposer à tous de faire la même chose. Et on peut, que cela soit raisonnable ou pas, être méfiant vis-à-vis des vaccins, et accepter de se faire vacciner a minima, pour se protéger et protéger l’ensemble des membres de la société.

N.B. Je n’ai quasiment pas parlé des effets indésirables des vaccins. Ils existent, mais en comparaison de ceux de très nombreux médicaments, ils sont faibles. Libre à chacun d’étudier à sa guise le rapport bénéfice/risque. Merci par contre de ne pas chercher à imposer à tout prix son point de vue aux autres.

Bibliographie :