Parfois, il suffit de peu de choses pour transformer drastiquement des composés en d’autres, de formes, de tailles complètement différentes. Les composés à l’honneur dans cet article en sont un exemple parfait.
Il s’agit ici de complexes de palladium, c’est-à-dire des assemblages moléculaires constitués d’un ion palladium Pd2+, entouré de molécules organiques plus ou moins complexes, appelés ligands. Les complexes de palladium sont très utilisés en chimie fine, comme catalyseurs d’une grande variété de réaction chimique. Ici, les ligands sont un peu particuliers : non seulement ils peuvent se lier à deux ions Pd2+ simultanément, mais en plus, ils sont sensibles à la lumière : sous certaines irradiations, ils vont se transformer, légèrement, mais suffisamment pour engendrer de grandes modifications de l’architecture de l’assemblage moléculaire.
Ces composés, dits photochromiques, vont changer de structure sous une irradiation à 313 nm, ce qui va écarter légèrement les atomes (d’azote ici, N) sur lesquels se fixent les ions palladium. En les irradiants à nouveau, à 617 nm, on peut obtenir à nouveau le composé de départ.
Spontanément, les ions Pd2+ et leurs ligands forment des sortes de trimères, des jolis triangles parfaitement stable. Mais sous l’effet de la lumière à 313 nm (UV proches), les ligands se transforment, ce qui conduit à la formation d’un petit rhombicuboctaèdre (je dis « petit », parce que d’après Wikipédia, il faut bien le distinguer d’un « grand rhombicuboctaèdre », qui n’a pas du tout la même structure (voyons !)). Et de la même manière, sous irradiation à 617 nm, on retrouve le petit triangle initial.
Il s’agit ici d’un article qui n’a pas prétention à proposer des applications. Néanmoins, passé l’émerveillement pour la beauté des structures obtenues, il apparaît que ces complexes photochromiques, qui changent totalement de forme et de structure sous irradiation pourrait avoir, dans un avenir certes assez lointain, des applications en médecine (relargage contrôlé par de la lumière d’un médicament contenu dans la « cage » que forme le rhombicuboctaèdre), catalyse, ou encore en électronique moléculaire.
« Light-Controlled Interconversion between a Self-Assembled Triangle and a Rhombicuboctahedral Sphere » M. Han et al. Angew. Chem. Int. Ed. 2015, 54, Early Edition