À peine la moitié des états-uniens croit que le réchauffement climatique est lié aux activités humaines. C’est dire l’importance de la médiation et de l’enseignement scientifique sur cette question, très politique au demeurant (ça, c’était pour faire le lien avec mon billet précédent). Publié dans la section Insights de la revue Science, un article fait le point sur le positionnement des enseignants des sciences aux USA sur ce domaine.(1) Parmi ceux qui l’évoquent en cours, ils ne sont que 54 % à souligner le rôle principal de l’activité humaine dans le réchauffement climatique.
En travaillant sur une cohorte statistiquement représentative de 6500 enseignants, Eric Plutzer (Université de l’Etat de Pennsylvanie) et ses collègues ont cherché à savoir quelles étaient les opinions et les pratiques pédagogiques de la profession sur le réchauffement climatique.
La première de leurs constatations est l’insuffisance du temps de cours passé sur le sujet. Chaque enseignant propose, en moyenne, 1 à 2 heures annuelles sur le sujet. Pourtant, l ‘Académie des Sciences américaines, qui a publié en 2012 ce que devrait être le programme en science enseigné jusqu’en terminale, fait du réchauffement climatique une thème à part entière à enseigner. (2)
Par ailleurs, les enseignants sont très mal informés du consensus scientifique sur les causes du réchauffement climatique. A la question : « quel pourcentage de scientifiques soutiennent l’idée que le réchauffement climatique est lié aux activités humaines ? » Ils ne sont que 30 % au collège, 45 % au lycée* seulement à donner la bonne réponse : « plus de 80 % » (la réponse étant, bien sûr, plus de 95 %). Ceci explique probablement la raison pour laquelle 31 % des enseignants parlent de causes humaines ET environnementales à leurs élèves, afin de ménager ce qu’ils pensent être l’absence de consensus général sur la question…
Enfin, les enseignants de science aux USA semblent manquer cruellement de connaissances sur le sujet. Les modèles climatiques, les preuves concrètes du réchauffement climatique et de sa concomitance avec l’élévation du CO2 atmosphérique ne semblent pas être maîtrisées. Cela se traduit évidement par la difficulté d’enseigner ce qu’ils ont du mal à appréhender, voire qu’ils ont du mal à croire. Cela se traduit également par la mise en avant, par environ 50 % des enseignants, d’éléments hors-sujets comme les pesticides ou le trou dans la couche d’ozone lors de l’évocation de l’évolution du climat…
À l’heure des primaires américaines où Donald Trump, climato-sceptique pur et dur triomphe chez les républicains, dans le pays qui émet le plus de CO2, constater que les enseignants de science ne sont pas des alliés fiables des scientifiques pour parler des causes réelles du réchauffement climatique, est sacrément inquiétant.
*correspondance approximative pour « middle-school » et « high-school »
(1) « Climate Confusion Among U.S. Teachers » E. Plutzer et al. Science 2016, 351 (6274), 664-665.
(2) National Research Council A Framework for K-12 Science Education : Practices, Crosscutting Concepts, and Core Ideas (Board on Science Education, National Academic Press, Washington D.C. 2012)
3 réponses à “Réchauffement climatique : les enseignants américains encore loin du compte”