[Flash Info Chimie] #15 Utiliser du fluor radioactif pour l’imagerie médicale

Ce qui est intéressant en imagerie médicale, plutôt que d’observer tout le corps, ou tous les organes, c’est de cibler directement les cellules qui nous intéresse. Pour cela, il faut qu’elles soient mises en valeurs, plus que les autres.

Le TEP-Scan est une des techniques classiques pour cela. TEP, ça veut dire « Tomographie par Emission de Positons », c’est-à-dire qu’on va injecter au patient un produit radioactif (de type β+) dont un atome se désintègre en émettant une particule, un positon. Ce positon est en fait l’antiparticule de l’électron, et va donc s’annihiler avec le premier qui passe par là en émettant deux rayons gamma. Un détecteur circulaire se charge d’identifier la direction d’émission, et donc de cartographier la répartition du produit radioactif dans le patient.

Schéma d'une expérience de TEP-scan. (source : wikipédia)

Schéma d’une expérience de TEP-scan. (source : wikipédia)

L’élément privilégié pour réaliser de la TEP est le 18F, isotope radioactif du fluor. On peut aussi utiliser du 11C, du 15O, ou encore du 13N. Le choix dépend de la cible que l’on veut atteindre, mais surtout du temps de demi-vie de l’élément. le 18F a l’avantage d’une demi-vie assez longue, 112 minutes (la moitiée du 18F s’est désintégrée en 112 min.). On a donc à la fois une activité importante, et une demi-vie suffisamment longue pour préparer le composé à injecter. Par comparaison, le 150 a une demi-vie de 2 minutes. Il faut le fabriquer (à l’aide d’un synchrotron dans l’hôpital) et l’utiliser immédiatement.

Dans l’article publiée par A. Hoehne et ses collègues (de l’équipe de Jonathan Du Bois à Stanford), le 18F radioactif a été greffé à un composé d’une famille plutôt spéciale, les saxitoxines :

saxitoxine[Ce qui est assez spécial, c’est la présence de deux résidus « guanidiniums » dans la molécule. Vous les voyez, j’en suis sûr ! (les NH2+ reliés par une double liaison à un carbone, lui même relié à 2 autres N (azote)).]

Ces toxines sont produites par une algue microscopique, elle-même consommée par les huîtres et les autres coquillages, qui deviennent alors impropres à la consommation… Leur toxicité est liée à l’inhibition des canaux sodiques voltage dépendant. Pour faire court, ils vont bloquer la transmission de l’influx nerveux dans les prolongements des neurones (les axones), et ainsi paralyser la victime.

En greffant ainsi un atome de 18F sur cette molécule, les chercheurs ont réussi cibler ces canaux ioniques particuliers. L’intérêt réside en l’observation des zones qui sont particulièrement riches en ces canaux : les lésions nerveuses. Là où les autres méthodes d’imagerie non invasive sont incapables de visualiser ces zones, ce composé nommé [18F]STX a permis de les localiser précisement durant les TEP-scan.

18Fsaxitoxine

Le 18F est fixé avec un bras espaceur qui permet de maintenir l’activité inhibitrice des canaux sodiques en une seule étape.

Les résultats obtenus sur des souris sont très encourageants. A moyen terme, le but est de réaliser des expériences sur les humains, afin de suivre plus efficacement l’action des traitements contre certaines douleurs chroniques, par exemple.

« A 18F‐Labeled Saxitoxin Derivative for in Vivo PET-MR Imaging of Voltage-Gated Sodium Channel Expression Following Nerve Injury » A. Hoehne et al., J. Am. Chem. Soc. 2013, ASAP.

 

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