Les discussions sur l’enseignement supérieur en France avec Tom Roud (voir son blog, et son compte Twitter) Sur Twitter sont souvent très riches. Quand Mix La Malice, Fabrice B.M., et Hans Bodart (et d’autres !) s’en mêlent, ça fait un joyeux mélange d’avis divergents, que ce soit sur le fond, comme sur la forme.
Il faut savoir qu’on a chacun des profils différents : Tom est en Amérique du Nord, professeur assistant. Mix est maître de conférence, Hans est doctorant, Fabrice… Fabrice, je sais pas ! Et moi, suis agrégé en lycée, après ma thèse de chimie.
Et donc, tout ce beau monde discute de l’intérêt des PRAG à l’université. Les PRAG, ce sont des PRofesseurs AGregés de l’enseignement secondaire, nommés dans l’enseignement supérieur, pour enseigner principalement en premier cycle universitaire, ou en IUT. Leur service, annualisé, est de 384 heures équivalents-TD. Un maître de conférence, enseignant-chercheur a un service de 192 heures équivalents-TD.
Un PRAG n’est pas censé faire de recherche, tout son service est consacré à l’enseignement. La différence de salaire est très faible dans les premières années, pour atteindre environ 400 € au bout de 10 ans au bénéfice du maître de conférence. Mais, officiellement, si un MdC fait plus d’heures devant les étudiants, cela ne lui est pas payé en heure supplémentaires. Alors qu’un PRAG, statutairement, devrait se voir payé des heures sup’. Dans les faits… ça varie d’un établissement à un autre. Il semblerait que les IUT sont assez sérieux, et rémunèrent correctement les heures sup’. Pour les universités, c’est moins clair…
La plupart des enseignants chercheurs n’auraient jamais pu être PRAG. C’est un peu provocateur, et je ne veux absolument pas ici remettre en question la difficulté des études et du recrutement pour devenir maître de conférence. Mais l’agrégation, il faut se la farcir !! Si dans quelques domaines on ne peut pas être enseignant chercheur sans agregation (philosophie par exemple)), la plupart du temps, les MdC n’ont pas tenté/réussi ce concours.
Si je fais cette longue présentation, c’est pour souligner que PRAG et Maîtres de Conférence n’ont pas le même métier. Un PRAG n’est pas un MdC qui ne fait que de l’enseignement, un MdC n’est pas un PRAG avec une décharge horaire pour faire de la recherche.
Donc, la discussion a porté sur l’intérêt, ou non, des PRAG en premier cycle universitaire. Je vais pouvoir donner ici mon point de vue, d’un prof de lycée qui est bourré de conflit d’intérêt, puisque ça m’intéresserait drôlement, à titre personnel, d’enseigner à la fac. (à bon entendeur, hein !).
Le rôle du PRAG à l’université est pour moi un rôle intermédiaire entre le prof de lycée, et l’enseignant-chercheur. Il faut bien imaginer le choc des cultures entre le lycée et l’université. On passe d’un espace très contraint (géographiquement, administrativement, pédagogiquement) à une espace très peu (trop peu ?) contraint. les PRAG ont un rôle à jouer dans cette transition. Là où la plupart des MdC vont à reculons (enseigner aux 1eres années), les PRAG peuvent être performants et motivés. Personnellement, aider à la réussite des premières années, je trouve ça particulièrement intéressant : c’est là où une grande partie des études se jouent, et ça devient presque « trop facile » d’enseigner en master : le public est déjà conquis ! (je ne parle pas ici du contenu des cours, bien sûr !) Mais motiver, travailler de façon la plus individualisée possible avec les étudiants, quitte à leur faire comprendre qu’ils ne sont pas vraiment faits pour ce type d’étude, ça, c’est ambitieux, et motivant ! Et ça, c’est le boulot de prof issus du secondaire, beaucoup plus que le boulot d’un enseignant-chercheur, qui n’a jamais été formé à cela.
Pour les contenus des cours à proprement parler, je crois que les PRAG ont largement le niveau pour enseigner en licence. Tom Roud pense que c’est nécessaire que tous les enseignants à la fac soient aussi des chercheurs. Je trouve ça intéressant, mais cela ne me convainc pas. D’une part, les PRAG doivent se tenir au courant des avancées dans les domaines qu’ils enseignent, et cela passe, pourquoi pas, par des séminaires de formation, des conférences organisées par les enseignants-chercheurs. Mais il ne me semble pas nécessaire qu’ils fassent de la recherche. De la même manière que les professeurs du primaire et du secondaire doivent se tenir au courant des avancées en science de l’éducation, sans qu’il soit nécessaire d’être chercheur en science de l’éducation. [D’ailleurs, les PRAG devraient se former aux avancées de leurs disciplines, mais aussi aux avancées en sciences de l’éduc !! ]. Cependant, ne négligeons pas l’intérêt primordial des enseignants-chercheurs dès les premières années : ce sont eux qui doivent donner envie, qui doivent être la « vitrine » de la recherche chez les tout jeunes étudiants. J’imagine bien un système où les PRAG assurent un programme commun à toutes les universités (50 % des unités d’enseignement par exemple), et les enseignants-chercheurs assurent des enseignements plus spécifiques à leurs domaines de recherche. Cela permettrait d’assurer une plus grande cohésion nationale, tout en permettant de soulager les MdC de certains enseignements qui ne les intéressent pas, et maintenant les spécificités des différentes universités. [Au moment où j’écris ces lignes, 10 000 autres idées me viennent en tête, et surtout que cet exemple de système ne doit pas être rigide, que les PRAG et les MdC doivent s’insérer dans les U.E. des uns et des autres].
Bref, loin de moi l’idée tant décriée d’aller vers une lycée-isation du premier cycle universitaire, mais je crois que les PRAG peuvent, et doivent jouer ce rôle pédagogique, qu’ils connaissent mieux que les maîtres de conférence, et qui permet de mettre un peu d’huile dans les rouages parfois grippés des licences en France.
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